samedi 29 juillet 2017

La Cimade dénonce les interpellations d'étrangers en préfecture-Devant la préfecture de Nanterre, la chaleur rend l’attente encore plus pénible

La Cimade dénonce les interpellations d'étrangers en préfecture
Trois salariés sans-papiers en grève dans les Hauts-de-Seine depuis le 19 avril ont reçu leurs récépissés de régularisation, préalables à l'émission d'un titre de séjour, délivrés par la préfecture des Haut-de-Seine, a-t-on appris auprès de la CGT, qui soutient le mouvement. — Joel Saget AFP/Archives
«Nous sommes très préoccupés par ces interpellations devant les préfectures.» Dans une enquête publiée ce mardi et menée entre octobre 2007 et mars 2008 dans un tiers des départements français, la Cimade (Conseil oecuménique d'entraide) s'alarme «des dysfonctionnements» dans l'accueil réservé aux étrangers dans les préfectures.

«Ces lieux devenant potentiellement risqués, trop d'étrangers font dorénavant le choix de rester dans la clandestinité», souligne Sarah Belaïsch, coordonnatrice du rapport. 

Douze interpellations en six semaines

Ne détenant aucune estimation globale du nombre d'étrangers interpellés dans ou près des préfectures, cette dernière a cependant indiqué, à titre d'exemple, qu'au cours de six semaines d'observation auprès de la préfecture de Melun (Seine-et-Marne), douze interpellations de ce genre ont eu lieu, la plupart concernant des étrangers venus demander des autorisations de séjour au titre du travail.

Interrogé, le ministère de l'Immigration fait remarquer qu'il est parfaitement légal d'interpeller dans une préfecture un étranger ayant reçu une OQTF (obligation à quitter le territoire), mais que ceux qui n'en font pas l'objet ne sont pas inquiétés.

La Cimade constate par ailleurs dans son rapport la mauvaise organisation de l'accueil dans les préfectures qui engendre des files d'attente interminables, commençant souvent avant le lever du jour. L'accès à l'information à distance est aussi problématique, ce qui oblige les étrangers à se déplacer aux guichets, participant ainsi à l'engorgement des préfectures. En ce qui concerne les pièces à fournir pour obtenir un titre de séjour, enfin, la liste n'en étant pas établie au niveau national, certaines préfectures présentent des exigences abusives.

Dix propositions 

Pour pallier «ces situations indignes», la Cimade formule une dizaine de propositions. Outre l'interdiction des interpellations en préfecture, elle préconise l'ouverture de nouveaux lieux d'accueil et la mise à disposition d'informations sur les procédures à suivre sur un livret, au téléphone ou sur le site Internet des préfectures. Elle prône aussi la définition de critères de régularisation «précis et objectifs», ainsi qu'une liste nationale des pièces justificatives à fournir pour telle ou telle demande.

Elle plaide enfin pour un rétablissement des possibilités de réexamen des décisions administratives, à travers la création d'une «commission de séjour» qui pourrait être saisie par les étrangers.










 

Devant la préfecture de Nanterre, la chaleur rend l’attente encore plus pénible

 

Des centaines d’étrangers, en attente de renouvellement de leur titre de séjour, doivent patienter sous un soleil cuisant. La préfecture distribue de l’eau et tente de gérer le flux.

Ce n’est déjà pas une sinécure en temps normal. Mais depuis le début de l’épisode de canicule, la file d’attente des étrangers, qui s’étire sur plusieurs centaines de mètres devant la préfecture de Nanterre, s’est transformée en petit enfer. Face aux risques de déshydratation, des bouteilles d’eau sont distribuées par les autorités aux centaines de personnes qui patientent sous un soleil cuisant.
« Dès lundi en raison de la chaleur, nous avons fait venir une équipe de la Croix-Rouge dans le hall de la préfecture, indiquent les services préfectoraux. Mardi, nous avons bloqué les gens aux grilles afin qu’ils n’attendent pas dans la cour, sous le soleil, et parce que nous ne pouvons pas tous les accueillir dans le hall ». Ce mercredi bien avant l’ouverture des guichets à 9 heures, deux files distinctes ont été matérialisées par des barrières, l’une pour les personnes avec convocation ou demandeurs d’asile, l’autre, la plus longue, pour les demandes de renouvellement de carte de séjour.
« Ce n’est pas pour moi que je m’inquiète mais pour les anciens »
En tête de file, Mohamed est arrivé d’Asnières à 1 h 30 pour renouveler sa carte de séjour. « J’ai déposé mon dossier depuis plus de trois mois et ma carte de dix ans n’est plus valable depuis un mois. Mon patron râle mais il n’a pas le choix », explique-t-il devant la grille, après déjà six heures d’attente. « Ce n’est pas pour moi que je m’inquiète mais pour les anciens », souffle-t-il. Devant lui, une dame de 78 ans est assise sur un siège pliant. « On est là depuis 1 h 20, pour accompagner la tata. Depuis deux ans ici, c’est rude », assure son neveu, qui habite à deux pas de la préfecture.

VIDÉO - L'attente "inhumaine" des étrangers devant la préfecture de Nanterre


Des heures de queue, parfois dès la veille au soir, parfois pour rien. Depuis un peu plus d’un mois particulièrement, des files d’attente interminables se forment devant la préfecture de Nanterre, près de Paris. Des étrangers vivant dans le département des Hauts-de-Seine veulent y faire renouveler ou mettre à jour des papiers. Mais faute d’un système fonctionnel de prise de rendez-vous par Internet, ils se retrouvent dans une situation ubuesque… 

Carte de séjour, permis de conduire, demande d’acquisition de la nationalité : quel que soit l’objet de la démarche, il faut prendre un rendez-vous en ligne. Dans les Hauts-de-Seine comme dans l’ensemble des départements de France, dans 90 % des cas en moyenne, la prise de rendez-vous ne fonctionne pas, 
comme l’a déjà montré la Cimade, une ONG qui défend du droit des étrangers en France. Elle dénonce "une stratégie du découragement". 

La situation a été filmée par de nombreux témoins. "À 4 h du matin, il est déjà trop tard vu le monde qu'il y a devant vous, vous pouvez être sûrs de ne pas pouvoir accéder à un agent dans la journée ; c’est intolérable et inhumain", dénonce notre Observateur, jeune cadre qui doit mettre à jour son titre de séjour tous les ans à la préfecture de Nanterre.
Depuis un mois, ils sont des centaines à faire la queue jour et nuit devant la préfecture de Nanterre pour renouveler leur titre de séjour. On annonce l'ouverture de deux nouveaux guichets ce jeudi. 
« Ne dépassez pas ! » lance, exaspérée, Christine à un homme derrière elle. Cette Ivoirienne de 48 ans attend depuis 6 heures du matin devant la préfecture de Nanterre. Comme des centaines d’autres étrangers qui font la queue, elle espère renouveler son titre de séjour. « Mon patron m’attend à 11 heures, c’est la galère ! », tempête Christine.

Cette situation perdure depuis un mois. Des femmes enceintes, des enfants, des personnes âgées et handicapées doivent composer avec la chaleur, pendant des heures, sans sanitaires ni point d’eau. Certains sont arrivés la veille et ont passé la nuit couchés sur des cartons. Près de l’entrée, la tension est palpable quand des personnes tentent de se greffer à la file d’attente. « Même les chiens sont mieux traités, déplore Sana, 36 ans, arrivée dans les 200 premiers. C’est dans ces situations-là que je me sens exclue. »

Le ticket d’accès au guichet se négocie 300 €


Dès l’ouverture de la préfecture, les équipes distribuent 600 tickets aux premiers arrivés pour accéder aux guichets. Une fois ce seuil atteint, les personnes encore dehors sont invitées à rentrer chez elles. Certains en font même un trafic. Et il est lucratif : dans la foule, on évoque 300 € pour un ticket. Rose, 59 ans, ne veut pas dire combien elle a payé. Mais c’est de cette façon qu’elle s’est procuré un ticket pour passer le jour même.


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